Les grandes questions

“Alors ta thèse, ça avance ?”

 

Grande question ! Souvent posée dans la plus grande innocence d’ailleurs.

Sachez que c’est une question que la majeure partie des thésards redoutent. Plus encore que “Alors ta thèse, c’est sur quoi ?” et même “Et ça sert à quoi ?”.

Pourquoi ? Parce qu’il faut savoir que dans la recherche les choses “avancent” rarement comme on aimerai.

D’abord parce qu’il y a beaucoup de raisons pour que ça n’avance pas. En voici une liste (non exhaustive) :

– les algo ne sont pas encore arrivés

– la / les machines pour les analyser sont en cours de construction / pas encore livrées

– la / les machines pour les analyser ne sont pas encore calibrées

– la / les machines pour les analyser sont en pannes

– la / les machines pour les analyser fonctionnent mais les résultats ne donnent rien de convaincant que l’on soit capable d’interpréter

–  on a de super résultats mais on ne sait pas comment les expliquer et on relit tous les papiers sur le sujet depuis des mois

– on a trouvé une explication mais nos chefs ne sont pas d’accords

– on passe tout un trimestre les deux pieds dans l’enseignement et donc, forcément, la recherche n’avance pas

– on rédige sa thèse (et donc par définition, même si ça avance, ça n’avance pas)

Je vous passe tous les problèmes administratifs, d’argent, de logistique, de santé, de communication et autre qui pimentent la vie de tout un chacun; mais qui contribuent aussi à ralentir une thèse.

Bref. Poser une telle question à un thésard, c’est risqué. Et le risque augmente au fur et à mesure que les mois de thèses s’égrènent.

Gare à vous !

“Ta thèse, c’est sur quoi ?”

La chose que le thésard fait surement le plus, en dehors de travailler à sa thèse, c’est essayer de raconter ce qu’il y fait. Epater la galerie… Enfin souvent c’est même plutôt “amuser” la galerie. La question “alors, ta thèse, c’est sur quoi?” s’accompagne presque toujours d’une petite étincelle dans le regard qui signifie “Voyons si je peux comprendre ce qu’on s’apprête à me dire.”

Et pour un thésard, c’est l’éternel casse-tête qui commence : réfléchir à comment présenter son sujet (que, souvent, lui-même ne comprend pas bien), en évitant d’avoir l’air d’un fou qui travaille sur un truc :

1) dont tout le monde se fout

2) dont tout le monde ignore l’existence (c’est pour ça qu’on s’en fout)

3) qui passionnera en tout et pour tout 20 personnes dans le monde. (bon, ok, disons entre 5 et 200 selon les sujets).

D’autant que lorsque vous posez ce genre de question, il faudrait préciser combien de temps vous comptez consacrer à la réponse, parce qu’un thésard peut parler de son sujet aussi bien pendant 4 secondes, 5 minutes, 30 minutes ou des heures entières, avec un apport de détails proportionnel au temps qu’il a pour en parler.

Si vous sentez que votre interlocuteur n’a pas l’air d’avoir envie d’en parler, soyez indulgent et mettez vous à sa place : cela fait des mois qu’il bosse sur un truc qui à l’air d’être du charabia pour la Terre entière  et à chaque fois qu’il rencontre quelqu’un, la conversation passe presque inévitablement par “Et alors ta thèse, c’est sur quoi ?” vu que ladite thèse occupe la majeure partie de son temps. Et le calvaire des explications ni trop foireuses ni trop compliquées recommence.

Enfin bref, vous l’aurez compris, ce n’est pas notre phrase préférée. Mais elle est souvent préférable à “Alors ta thèse, ça avance ?”

 

“Et à quoi ça sert ?”

Après avoir vainement tenté de définir simplement (enfin disons de vulgariser un peu) son sujet de recherche, il reste à essayer tant bien que mal de trouver des applications concrètes à notre travail histoire de remonter (un peu si possible) dans l’estime de son interlocuteur.

Car la plus grande question d’un public non initié aux mystères de la recherche scientifique est l’utilité de ce qu’on fait. Parce que chercher c’est bien mais trouver c’est mieux ! (Eh oui le monde adore nous rappeler qu’on est des chercheurs et non des “trouveurs”). Et vu le temps que la Recherche nécessite, autant que ce soit utile, non ?

Bref, avant de poser cette questions, regardez autour de vous et dites vous bien que ça vient de l’esprit d’un chercheur.

sources :
sosted
phdelirium
phdcomics

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